Xénophobie, racisme, antisémitisme, islamophobie : … ces maux sont-t-ils des délits ? Des mots au-delà du délire !

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             Nos sociétés sont parcourues de nombreuses tensions, qui conduisent à des montées de violence. C’est le travail de la justice de mettre de l’ordre dans cela en punissant dans la mesure du possible les délits. Racisme, antisémitisme et homophobie appartiennent au vocabulaire des jugements.

Le racisme est-t-il réellement une circonstance aggravante d’un crime ? Je pense que tuer quelqu’un à cause de sa couleur de peau, son sexe, sa religion, sa taille, ça peut tout simplement être classé comme crime gratuit, c'est-à-dire des crimes sans circonstances atténuantes, ni même explications, encore moins défendables donc en général que les meurtres passionnels, comme l’assassinat de Laroche par Jean-Marie Villemin ou même que les crimes crapuleux, du genre de ceux d’Alfredo Stranieri ( j’ai vu récemment un « faites entrez l’accusé » consacré à ce « voleur de vies » ). Après, au-delà du mobile de l’acte, je ne parlerai pas des autres circonstances que les jurys doivent examiner : de sang froid ou pas, volontaire ou pas, de légitime défense ou pas. Je rappelle en tout cas qu'au-delà même de toutes considérations religieuses (je ne vous ai toujours pas fait l’article sur la religion promis), le commandement « tu ne tueras point » reste pour moi un fondamental.

D’ailleurs, mon propos n’est pas de parler forcément des cas de morts d’homme, mais de l’ensemble des inculpations et jugements où le racisme est invoqué pour qualifier des faits.

            Ainsi, lors des événements malheureux des buttes Chaumont, où un jeune Juif Rudy a été récupéré dans le coma après avoir été molesté par une bande ethnique, on a d’abord retenu le qualificatif « coups et blessures en bande pouvant entraîner la mort, aggravé par antisémitisme ». L’enquête a montré que ce qui est arrivé résultait plutôt d’un énième affrontement entre bandes rivales, qui s’opposent pour des raisons de territoire et surtout d’appartenance à une communauté : juive, noire,.... On pourrait donc plutôt parler de coups et blessures en bandes communautaires ayant pu conduire à la mort. Quoi qu’il en soit, cela mérité d’être jugé et surtout combattu, car dans ce genre de situations pourries, il sera impossible de savoir qui a commencé. La vraie question étant donc de savoir comment on peut juguler puis interrompre ces haines et ces agissements

            On se félicitait encore récemment que les affrontements de bande en banlieue, qui avaient fait l’actualité en débordant sur Paris, n’opposent pas des groupes ethniques, mais des jeunes qui se rassemblaient selon leur quartier. Pas que cela soit beaucoup plus intelligent de se taper dessus parce que l’un est de Sarcelles et l’autre du Blanc Mesnil, mais au moins le risque est circonscrit territorialement. Il ne peut y avoir identification d’autres protagonistes. Et, c’est un peu moins difficile de changer de domicile que de couleur de peau. Cependant, et les événements des buttes Chaumont le prouvent, la dérive communautariste, comme aux Etats-Unis est à craindre.

            En effet, si je disais que à mon sens racisme=absence de raison pour un acte délictuel, il n’en reste pas moins que ce qui touche à la stigmatisation d’une communauté est condamnable. Ce qui est effectivement peut-être un délit spécifique, c’est l’incitation à la haine raciale : puisqu’il s’agit en jetant de l’huile sur le feu ou en allumant soi-même un brasier, d’ouvrir la brèche aux événements les plus graves. C’est un acte politique qu’on doit combattre, y compris par les moyens de la justice. Quand le Ku Klux Klan dit qu’il faut brûler les noirs, quand on peint des « Juden » sur les devantures des magazins tenus par les Juifs, quand le président Zimbabwéen traite les fermiers blancs de citoyens de seconde zone qu'il faut exproprier, quand on dit « tous les bougnoules sont des sales voleurs », quand on émet des cris de singe dans un stade dés qu' joueur noir touche la balle, il faut savoir sévir pour circonscrire l’incendie de la haine et de la bêtise. Je me méfie pas mal du politiquement correct, et ce serait ridicule de condamner des gens dès qu’ils disent un mot de travers, même quand celui-ci est monté en épingle dans les médias. Néanmoins, je crois que pouvoir considérer l’injure publique à caractère racial comme un délit est salutaire, car ça permet d’adresser des cartons jaunes à des gens qui dérivent sur une mauvaise pente. L’important étant d’obtenir du contrevenant des excuses sincères.

 

            PostScriptum : L’alliance entre les trois extrêmismes :

            En parlant de déclarations à la limite du politique correct, l’actualité récente rappelle à notre souvenir Dieudonné. J’aime plutôt bien son humour, mais il faut reconnaître que l’homme file un mauvais coton Si « IsraHeil » est un jeu de mots qui peut me faire rire, quand il tient ses propos sur la pornographie mémorielle, on peut dire qu’il dérape, car là, il n y a plus d’humour. Je crois qu’on peut rire de tout, mais il faut savoir éviter de se prendre au sérieux. Or, les dérapages de Dieudonné, à force de s’accumuler, ressemblent moins à une liberté de ton qu’à une politique intentionnelle : on se met à la limite du répréhensible, pour tester les autorités, on fait monter un climat délétère, et on se regroupe entre victimes du complot Juif.

          L’actualité qui fait jaser, c’est donc le baptême du quatrième enfant de Dieudonné par le prêtre traditionnaliste Philippe Laguérie avec pour parrain Jean-Marie le Pen. En passant, je vais donc évoquer ce sujet, qui n’était pas prévu quand j’ai commencé à rédiger ce billet.

             Au-delà des affinités personnelles qui ont pu se créer entre les trois hommes, qui étaient pourtant très éloignés il y a 5 ans, cet acte a une valeur symbolique. Il marque l’alliance entre différents extrémismes :

          -L’extrémisme tiers-mondiste antisioniste qui dérive vers l’antisémitisme : celui qu’on qualifie parfois de « rouge brun ». Sous couvert de défense de la cause palestinienne, certains vont plus loin dans la haine du Juif, remettant au goût du jour tous les stéréotypes de l’antisémitisme. On peut parler des diatribes véhémentes de la porte-parole des Indigènes de la République, des positions du philosophe Alain Soral, et des dérapages de Dieudonné

     -L’extrémisme ultracatholique : puritain, pourfendeur des comportements immoraux, conservateur et réactionnaire en ce qui concerne les mœurs, et fermé aux autres cultures, religions et athéismes.

           -L’extrémisme poujadiste, populiste, plus attrape-tout, qui consiste à se saisir de sujets chauds d’actualité, comme l’immigration pour montrer du doigt des bouc-émissaires et faire de la démagogie. Cela a été la ligne principale du Front National. Même si le mouvement était aussi composé de certains idéologues proches des ultras catholiques, même si Jean-Marie le Pen avait sans doute lui-même quelques convictions traditionnalistes profondes, il suivait l’air du temps sur une ligne racisme France profonde. Et, sa fille, Marine le Pen, pas opposée à l’avortement, va encore plus loin dans l’abandon de l’idéologie sur ce sillon populiste

 

            Ce qui rapproche ces trois extrémismes qui ont pu et peuvent encore s’opposer, c’est finalement l’antisémitisme. Bref, il s’agit d’une alliance qui se construit sur la haine, mais je ne crois pas qu’elle soit si pérenne que cela. Ce n’est pas un hasard si les trois hommes ont voulu rester un peu discrets. Pas sûr que certains amis intégristes et tiers-mondiste de Dieudonné goûtent beaucoup cette affichage catholique, cette religion considérée comme un outil de domination de l’Occident sur le Tiers-Monde. Pas sûr non plus que les bigotes de la paroisse de Saint-Eloi apprécie beaucoup ce trublion qui a fait un spectacle en l’honneur de Judas où il se moquait du Christ. Et, pas sûr qu’au Front National, on ne se lasse pas de ce baroud d’honneur dans les provocations (retour du détail de l’histoire, plaisanterie sur les Chtis joués par des acteurs d’origine arabe) de Jean-Marie Le Pen.

 

            Je voudrais terminer cet article où j’ai essayé de poser calmement les choses en ce qui concerne le racisme, en disant qu’il ne faut pas aller trop loin dans la distinction antisémitisme, islamophobie, racisme anti-français… L’ensemble ressort surtout de la bêtise, de l’intolérance qu’il faut combattre par les armes répression et prévention. On ne doit pas tant se battre contre les racistes, que contre le racisme.

Publié dans Politique et société

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