Candidats à la Grande Election (1)
Jusqu’alors, j’ai principalement parlé de la candidature socialiste, de la candidature de l’UMP, et de la troisième voie bayrouienne, car il s’agit des trois candidatures les plus crédibles, portant des projets larges de gouvernement. Cela dit, les neuf autres candidats ne peuvent être considérés comme entités négligeables. Ils apportent tous des idées qui méritent de s’y intéresser. Et, heureusement que la campagne officielle ne se limite pas à Ségolène Royal, Nicolas Sarkozy et François Bayrou. Parlons donc comme prévu des neuf candidats que j’ai peu évoqués.
Tout d’abord, on ne peut pas faire l’impasse sur un candidat à l’importance certaine, ne serait-ce que par les voix qu’il est susceptible de récolter, le seul candidat à cette élection qui ait déjà connu un second tour d’élections présidentielles, je veux dire Jean-Marie Le Pen. C’est le plus vieux des prétendants. On retrouve le discours basique des anciennes campagnes du leader d’extrême droite : l’immigration est cause des maux de
Etrangement, ce fut Philippe de Villiers qui joua le modérateur de l’affrontement par communiqués interposés entre Sarkozy et Le Pen, avec « il n y a pas de Français virgule ». Philippe de Villiers est bien loin en intention de votes de Jean-Marie Le Pen. Parfois, notamment quand on entend parler son porte-parole Guillaume Peltier, le positionnement politique de De Villiers est au moins au niveau de l’extrêmisme anti-immigrationniste de Le Pen. Cela dit, le crêneau de De Villiers est plutôt celui de la poursuite du combat millénaire entre la civilisation judéo-chrétienne et l’islam. Si l’islamisme représente réellement un danger dans notre monde, De Villiers essaie de jouer sur une paranoïa exagérée. Je l’ai vu une fois en débat face à Tariq Ramadan. Et, le moins qu’on puisse dire c’est que l’intervention de De Villiers sans nuances, faisant passer le communautariste musulman pour un modéré, m’a paru totalement contreproductif en ce qui concerne la lutte contre l’intégrisme musulman. L’autre grand cheval de bataille de De Villiers, c’est le souverainisme face à l’Europe technocratique qu’il dénonce depuis des dizaine d’années. Si le souverainisme est un courant d’idées respectable, je trouve un peu gros d’accuser l’Europe de tous les maux des Français, et je suis persuadé qu’il ne faut pas se replier sur nous-même. Une différence de Philippe de Villiers avec Jean-Marie Le Pen est qu’il affirme être prêt à gouverner, fort de certains des succés de sa politique de droite en Vendée. En gros, je dirais que Le Pen est à l’extrême droite(d’abord extrême puis droite), et De Villiers est à la droite extrême (d’abord droite, puis extrême)
Parlons maintenant de Frédéric Nihous, candidat de Chasse Pêche Nature et Traditions. C’est une campagne avant tout catégorielle. On peut cela dit élargir l’horizon : « lobby des chasseurs-pêcheurs » à « défense de la ruralité », un thème qui a une certaine portée dans cette campagne, car il correspond à un vrai malaise de certains Français. Le bonhomme a l’air plutôt sympathique. Le dialogue avec deux villageois d’un de ses clips de campagne ne semble pas très naturel, mais ce n’est pas le seul candidat à être dans ce cas-là. Il défend une vision de la société assez traditionnaliste (le ‘T’ de CPNT), et est donc critique avec les nouveautés, notamment celles imposées par l’Europe. Mais, on ne peut que s’attrister de la désertification de certaines campagnes et de la difficulté de maintenir une diversité agricole. Le but de Frédéric Nihous serait de dépasser en nombre de voix la candidate des Verts, considéré un peu à juste titre comme un mouvement d’écologistes des villes.
Venons-en donc aux Verts et à Dominique Voynet. Sa candidature souffre de l’impression de cacophonie laissée souvent par la vie interne du mouvement des Verts, de l’appel au vote utile du Parti Socialiste et de la signature par les grands candidats du Pacte Ecologique de Nicolas Hulot ? Est-ce que ce dernier suffit ? Je pense que, s’il est respecté, c’est un bon début, même carrément un grand pas pour que la France soit à la pointe de l’ « excellence environnementale », comme dit Ségolène Royal, car il contient un certain nombre de contraintes pour les Français, il faut bien le dire. Après, comme j’ai déjà eu l’occasion de l’évoquer ( http://souriantalavie.over-blog.com/article-4915647.html ), compte-tenu des échelles de temps et d’espace qui sont impliquées, on ne peut arrêter le réchauffement climatique, seulement le limiter. Et, les solutions ne peuvent être franco-françaises, mais mondiales. Que la préoccupation environnementale essaime à travers toute la société française est vital, et le fait que l’écologie soit défendue au-delà des Verts est une bonne chose. Ca évite que ce combat soit confisqué par un parti et un camp, la gauche. Comme d’autres, je ne me reconnais pas dans le côté gauchiste et soixante-huitard des Verts (dénoncé récemment par Daniel Cohn-Bendit, pourtant grand leader des manifestations étudiantes de mai 1968) Je sais que mai 1968, par son caractère exceptionnel, a fait bouger la société française dans des proportions importantes, ce qui a permis d’avancer certaines mesures essentielles, notamment quant au droit des femmes (contraception, IVG, ...), mais, comme dans toute révolution, il ne faut pas persister dans certains excès. Et, alors qu’on est bien loin de la société prospère et des chemins tout tracés des Trente Glorieuses, un peu d’ « ordre juste » est nécessaire. (Wow ! Les slogans de Ségolène Royal sont quand même bien trouvés) Je ne partage pas l'avis des Verts quand ils exigent la régularisation massive des sans-papiers sans conditions. Cela dit, quand ils parlent d’écologie, la voix des Verts est utile : j’apprécie leurs combats dans certaines municipalités de France, notamment à Paris, contre l’utilisation systématique de la voiture personnelle. Le combat de Dominique Voynet est difficile, mais elle est opiniâtre, et j’aime quand elle demande aux journalistes d’arrêter de lui poser des questions sur Ségolène Royal, les sondages et la tactique politicienne, et de s’intéresser à son programme. Peut-être que c’est la candidate qui me paraît la plus sympathique de tous. C’est dommage qu’elle ne parvienne pas à atteindre le score de Noël Mamère en 2002, dont pour le coup je n’aime pas la personnalité.
A suivre